De la production au bricolage scalaire : politique des échelles dans la transition énergétique à Fessenheim
La fermeture de la centrale nucléaire de Fessenheim en juin 2020 a été précédée de la signature d’un document programmatique, le Projet d’avenir du territoire de Fessenheim (PAT), devant accompagner son arrêt et assurer une reconversion industrielle. Rédigé par l’État et les collectivités territoriales, il institue trois échelles spatiales qui cadrent la transition post-nucléaire. Cette communication propose de prendre le cas de Fessenheim pour renforcer nos connaissances sur les pratiques concrètes de la politique des échelles au sein de transitions énergétiques (Palle, 2021) en interrogeant (1) les conséquences de l’inscription de ces trois niveaux sur la matérialisation de la transition et (2) le jeu social ayant mené à leur établissement. En nuançant une unique approche constructiviste des échelles, parfois critiquée pour sa nature téléologique (Becker & Naumann, 2017 ; Bridge et al, 2013), nous nous concentrons sur les « scalecraft » (Fraser, 2010) des acteurs, le travail artisanal, les techniques, compétences ainsi que les difficultés qui sous-tendent tout assemblage scalaire (Papanastasiou, 2019). Cette proposition s’appuie sur la construction d’un corpus d’articles de la presse régionale ainsi que sur 46 entretiens menés avec les acteurs du PAT. Nos recherches montrent que les échelles du PAT, dont l’existence cadre la physionomie de la transition post-Fessenheim, reposent sur trois dynamiques : un effort de naturalisation des échelles par les acteurs via une rhétorique d’économisation du problème et ainsi que l’interprétation du droit ; une mise en politique de la transition autour de l’enjeu conflictuel des pertes fiscales ; un travail de lobbying des collectivités. En conclusion, nous identifions sept facteurs participant à la construction des échelles dans le projet de transition.