Un Observatoire Hommes-Milieux (OHM) est un outil d’étude des socio-écosystèmes anthropisés, conçu pour répondre à leur complexité par la mise en œuvre d’une démarche globale d’étude en créant les dynamiques pour la mise en place de l’interdisciplinarité nécessaire pour y parvenir. Un OHM s’organise autour d’un fait structurant qu’un événement fondateur est venu bouleverser profondément.
Le cas Fessenheim
Le site de Fessenheim fait partie des territoires qui au cours de leur histoire, ont subi une profonde transformation par un impact anthropique majeur. Le Grand Canal d’Alsace, puis la chute hydro-électrique de Fessenheim, et enfin l’implantation d’un Centre Nucléaire de Production d’Électricité (CNPE) ont profondément modifiés le socio-écosystème environnant, et ce de part et d’autre de nos frontières. Cela a permis l’expansion socio-économique des communes avoisinantes, par le développement d’un bassin important d’emplois directs et de sous-traitants favorisant la création d’un réseau local d’industries, de commerces et d’un fort tissu social et associatif. La décision de fermer le site de Fessenheim induit une phase de transition profondément marquée par les politiques énergétiques, et pouvant mener à une modification profonde des interactions hommes–milieux et une réorganisation progressive et importante du territoire, en termes de bassin d’emploi, de ressources, de paysages, d’immobilier pour ne donner que quelques exemples.
Fait structurant
Sur ce territoire particulier, le fait structurant, ou l’objet focal est la construction de la centrale de Fessenheim avec toutes ses conséquences environnementales, économiques et sociales qui ont profondément marqué le territoire. Il s‘inscrit dans un contexte de pression anthropique massive exercée sur la bande rhénane (navigation, industrialisation, production d’électricité dont nucléaire) au niveau du Rhin supérieur, conduisant à des modifications profondes du cours du fleuve et de l’aménagement de ses rives, dont la réalisation du Grand Canal d’Alsace qui conduit à la création d’une île artificielle de 52 km de long entre Saint Louis et Neuf-Brisach équipée de quatre chutes et écluses, et favorisant le développement industriel et urbain de ce secteur et de ses alentours.
Comme le montrent les cartes et la photographie aérienne ci-dessous, le milieu a été complètement transformé par la construction de ces grandes infrastructures le long du Rhin, ces aménagements étant couronnés par l’installation du CNPE Fessenheim. La construction de ce dernier a été décidée en 1967, elle a démarré en 1970, et sa mise en exploitation commerciale a débuté en 1978.
Évènement fondateur
Le CNPE Fessenheim a été un facteur important dans l’évolution et l’anthropisation du territoire du Rhin Supérieur. La décision de fermeture de cet équipement très emblématique, inscrite au CA d’EDF du 6 avril 2017, va réorienter le développement de cette zone d’un point de vue humain et naturel et constitue l’événement fondateur de l’OHM, au-delà des annonces politiques et de leur histoire. La fermeture du CNPE va entraîner des modifications profondes, tant au niveau environnemental et physico-chimique, qu’au niveau social, économique, énergétique et politique, engageant des temporalités variées (immédiates, à moyen et à long termes, voire indéterminées) et des échelles spatiales spécifiques susceptibles d’interagir entre elles. Modifications des ressources et écosystèmes « naturels », transformations du bassin d’emplois, répercussions sur le foncier et l’immobilier, incidences paysagères, perte de ressources économiques et fiscales, impacts sur la capacité énergétique du territoire alsacien, etc, cette liste n’est bien entendu pas exhaustive.
À la date de création de l’OHM en 2018, l’arrêt de la production de la centrale de Fessenheim était programmé pour fin 2018 ou début 2019. Ce sera finalement le 22 février 2020 que sera arrêté le premier réacteur de la centrale. Le second suivra le 29 juin 2020, sonnant ainsi l’arrêt définitif de la production du CNPE Fessenheim. Néanmoins, la connaissance en amont du T0 d’observation est un atout, qui permet de synchroniser le démarrage de l’observation avec l’événement déclencheur. Le T0 ( lire « T-zéro », T pour « Temps » ) correspond à l’état socio-écologique de l’objet focal « Fessenheim » au moment de la décision de fermer la centrale.