Détails de la conférence

Uniquement par visioconférence

Français

Le démantèlement : ramener le nucléaire sur Terre ?

Ange Pottin

Date | horaire

03/11/2025 | 14h - 15h

Résumé de la conférence

Le déploiement de l’industrie nucléaire depuis la Seconde guerre mondiale s’est appuyé sur un imaginaire représentant le nucléaire comme une source d’énergie immense née de la seule rencontre entre le génie humain et les potentialités du cœur même de la matière. Cet imaginaire, qui connaît un sursaut et des mutations dans le contexte actuel de « relance » annoncée du nucléaire, relègue à l’arrière-plan les vastes et fragiles réseaux terrestres qui, des mines d’uranium au stockage des déchets en passant par le traitement chimique du combustible, rendent possible la fission contrôlée en réacteur. Ce faisant, cet imaginaire a pu également justifier, légitimer et parfois remiser dans l’ombre la production d’un vaste et encombrant héritage radioactif. Aujourd’hui, les enjeux liés au démantèlement en cours ou à venir des infrastructures existantes appellent à patiemment détricoter cet imaginaire, en rendant tangibles les nombreux points problématiques qui rattachent les ensembles techniques nucléaires à la Terre. Dans cette présentation, je m’appuierai notamment sur deux exemples : d’une part, les nombreux résidus générés par le traitement du combustible irradié à l’usine de La Hague – pièce centrale de l’imaginaire d’un nucléaire indépendant de la Terre car potentiellement en « cycle fermé » ; d’autre part, le graphite irradié – héritage encombrant et longtemps négligé des débuts de l’âge nucléaire en France. Je les analyserai en employant, à la suite de travaux récents en sciences humaines, le concept de « résidus » dans un sens très général : tout ce que les innovations laissent durablement derrière elles, et qui, comme le démantèlement nucléaire et ses infrastructures en attente le montre fort bien, ne se limite pas à ce qui est officiellement reconnu comme un « déchet ultime ».

Courte biographie

J’ai été formé en histoire et philosophie des sciences à l’ENS de Paris, où j’ai soutenu ma thèse en 2022. Cette thèse portait sur l’histoire de la mise en place de la politique de « cycle du combustible fermé » en France dans les années 1950-1970, et sur la représentation des relations entre la technique et la nature qui soutenait cette politique. J’ai synthétisé les principaux résultats de cette thèse dans le livre Le nucléaire imaginé, sorti à La Découverte en 2024. J’ai continué mon parcours, à la croisée de la philosophie, de l’histoire des sciences et des STS – Science and technology studies, au cours de deux postdoctorats en Europe centrale, l’un au Centre français de recherches en sciences sociales de Prague, l’autre dans le cadre du projet ERC Innovation Residues à l’Université de Vienne. Dans le cadre de ces postdoctorats, j’ai pu mener des enquêtes en sciences sociales sur le démantèlement des réacteurs UNGG et sur les anciennes mines d’uranium dans le Massif central. A compter de décembre 2025, je serai professeur junior en humanités environnementales à l’Université Bourgogne Europe à Dijon, avec un projet autour de l’héritage résiduel de l’industrie nucléaire.

Lectures conseillées

Le nucléaire imaginé, Ange Pottin, aux éditions La Découverte (2024). URL

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