Détails du projet

Étude du rôle d’une zone humide sur la rétention de radionucléides (Co-60, Cs-137) : cas de l’hydrosystème Rhénan proche de la centrale nucléaire Fessenheim

Lauréat
APR 2024
État du projet
En cours
Porteur
Lu Liu
Participants
Haohan Zhang | Mirella del Nero | Anne Boos
Unité
IPHC UMR 7178 - UNISTRA
Budget
6000 EUR
Discipline(s)
Chimie physique et analytique, Sciences du système terrestre
Mots-clés
Zone humide, Mécanisme de rétention, Radionucléides, Matière organiques, Minéraux, Environnement

Ce projet se concentre sur l’étude d’un continuum berge-eau-sédiment du Rhin, situé à proximité de la centrale nucléaire de Fessenheim, mise en arrêt définitif en 2020. L’objectif principal est d’examiner le rôle d’une zone humide dans ce continuum sur le piégeage d’éléments traces métalliques et de radionucléides, incluant certains radionucléides déjà présents sur le terrain en raison des essais nucléaires atmosphériques antérieurs, et qui sont également susceptibles d’être libérés pendant le démantèlement de la centrale. Les radionucléides ciblés pour cette étude sont le Cobalt-60 (Co-60) et le Césium-137 (Cs-137). Une attention particulière sera accordée à la compréhension des processus clés qui régissent la rétention / les transferts de ces radionucléides dans le continuum eau-sol de la zone humide étudiée, avec un focus sur les interactions entre les radionucléides, les matières organiques (tant naturelles que générées par l’activité humaine) et les minéraux et / ou les colloïdes minéraux présents. Ce projet, adoptant une approche pluridisciplinaire combinant radiochimie et géochimie, ambitionne de générer des connaissances fondamentales qui contribueront significativement à l’avancement de notre compréhension du rôle des zones humides dans la filtration des éléments traces métalliques et des radionucléides. Ces connaissances sont essentielles pour développer des mesures de protection et de gestion durable des zones humides face au changement climatique global.

Motivations

Ce projet représente une avancée significative dans le domaine de la recherche en écologie de la santé et environnementale. Il s’inscrit dans le cadre d’une collaboration multidisciplinaire, principalement locale, rassemblant des experts de divers domaines. Ce projet est une continuation et un approfondissement des recherches initiées dans le cadre du projet Watchbird, financé par LabEx DRIIHM, et s’intègre dans les activités interdisciplinaires de l’IPHC ainsi que dans le cadre de la Chaire de professeur junior (CPJ) de la porteuse du projet, dédiée à la thématique du Démantèlement & Assainissement.

L’envergure internationale de ce projet est renforcée par des collaborations naissantes avec l’Université de Hirosaki au Japon, qui se spécialise dans la radioécologie autour de la centrale nucléaire de Fukushima. Cette collaboration internationale est matérialisée par l’accueil d’une chercheuse doctorante au sein de notre équipe pour une durée de quatre mois, durant laquelle elle se consacrera exclusivement à ce projet. Son expertise et sa perspective apporteront une valeur ajoutée considérable à nos travaux, en enrichissant nos recherches avec des connaissances et des expériences issues d’un contexte post-accident nucléaire.

Ce projet, par son caractère pluridisciplinaire et international, vise non seulement à élargir notre compréhension des enjeux écologiques actuels, mais aussi à développer des stratégies novatrices pour la gestion et la restauration des écosystèmes impactés par les activités nucléaires. Il s’agit d’une opportunité unique de combiner expertise locale et internationale, offrant ainsi une plateforme de recherche dynamique pour relever les défis contemporains en matière d’écologie de la santé et environnementale.

Cadrage

Les zones humides, situées à l’interface entre les compartiments atmosphérique, terrestre et aquatique, jouent un rôle crucial dans le stockage de matières organiques et de CO2 atmosphérique, contribuant ainsi à la régulation écologique. Leur capacité à stocker ces matières leur confère également la propriété de piéger certains éléments/molécules des hydrosystèmes fluviaux, y compris les éléments traces métalliques (ETM), les radionucléides (RN) et les micropolluants organiques. Cependant, cette fonction de filtration peut être altérée par des modifications des paramètres environnementaux, notamment dues au changement climatique global. Il est donc essentiel d’étudier les processus internes des zones humides qui contribuent à la rétention ou la libération potentielle de ces ETM/RN et micropolluants, particulièrement sous l’influence de ces changements.

Le projet, initié par Lu Liu et Haohan Zhang, se concentre sur l’étude du continuum berge-eau- sédiment dans l’hydrosystème fluvial du Rhin, avec un accent particulier sur la région entourant la centrale nucléaire de Fessenheim, en arrêt définitif en 2020. Cette région est soumise à d’importantes influences anthropogéniques, incluant des activités industrielles, urbaines et agricoles. Notamment, durant les plus de 40 ans de fonctionnement et le futur démantèlement de la centrale nucléaire de Fessenheim, des effluents contenant des faibles teneurs de radionucléides ont été et sont susceptibles d’être rejetés dans le grand canal et le Rhin, conformément aux taux règlementaires.

Les zones humides présentes filtrent les eaux fluviales du Rhin, contribuant ainsi à l’atténuation de la dissémination des radionucléides dans ces eaux. Les interactions entre les matières organiques et les RN, qui sous-tendent cette fonction de filtration, présentent une complexité remarquable et constituent un champ de recherche en pleine expansion. D’une part, l’étude des interactions entre les matières organiques naturelles et des radionucléides tels que le cobalt-60 (Co-60) et le césium-137 (Cs-137), nécessite une exploration plus approfondie. D’autre part, l’accumulation de matières organiques d’origine anthropique (micropolluants organiques) dans cette zone spécifique et leurs interactions avec les polluants métalliques demeurent peu connues. Comprendre ces mécanismes d’interaction est essentiel pour une gestion efficace pour la protection des zones humides, ainsi que pour élaborer des stratégies d’assainissement adaptées aux hydrosystèmes impactés par les polluants. Cette compréhension est également cruciale pour anticiper et atténuer les effets du changement climatique sur ces environnements à la fois fragiles et vitaux.

Objectifs

L’objectif principal de ce projet est d’approfondir notre compréhension du rôle des zones humides proches de la centrale nucléaire de Fessenheim, en se concentrant sur leur capacité à retenir les radionucléides. L’étude portera principalement sur deux aspects clés : les interactions des matières organiques et des (colloïdes) minéraux avec des radionucléides. Notre démarche consistera à mener des recherches approfondies sur les mécanismes mis en jeu dans la rétention / les transferts, en examinant spécifiquement les interactions entre les micropolluants organiques présents dans la zone (le long d’un profil de sol et de l’eau porale) et de faibles concentrations de radionucléides (Cs-137, Co-60), rejetés notamment par les centrales nucléaires.

Nous projetons d’élaborer une méthodologie détaillée pour identifier et quantifier les interactions au niveau moléculaire. L’ambition est de constituer une base de données complète, révélant les molécules clés qui jouent un rôle dans la rétention ou la dispersion de ces radionucléides au sein des zones humides. Les résultats de ce travail contribueront significativement au discours scientifique sur les répercussions environnementales liées aux rejets de faibles doses de radioactivité. Cette étude vise à enrichir notre connaissance des processus écologiques vitaux, tout en fournissant des informations essentielles pour la gestion efficace et la préservation des écosystèmes aquatiques, notamment dans le contexte du changement climatique.

Méthodologie

La méthodologie de ce projet implique une collecte minutieuse et systématique d’échantillons de sol, y compris des carottes de sol, ainsi que d’eau interstitielle (technique de la bougie poreuse). Ces échantillons seront soumis à une analyse détaillée et multivariée. L’évaluation exhaustive des éléments présente, incluant les éléments traces métalliques, sera réalisée à l’aide de techniques avancées de chromatographie et de spectrométrie de masse. Des instruments spécifiques, tels que l’ICP-OES (spectrométrie d’émission atomique à plasma induit par couplage) et l’ICP-MS (spectrométrie de masse à plasma induit par couplage), ainsi que la chromatographie ionique, seront employés pour ces mesures. La mesure des radionucléides présents sera réalisée en utilisant la spectrométrie gamma avec le détecteur de Germanium Hyper Pur.

Parallèlement, une analyse approfondie de la composition minéralogique des sols et des matières organiques présentes dans ces échantillons sera effectuée. Cette analyse inclura l’identification des micropolluants organiques et s’appuiera sur des équipements de pointe comme la spectroscopie UV-Visible, la spectroscopie de fluorescence et la ESI-MS (spectrométrie de masse à ionisation par électrospray). L’objectif de ces analyses combinées est de déchiffrer les interactions entre les différentes fractions de micropolluants métalliques (solubles, extractibles et résiduelles), les minéraux, et les composants organiques, y compris les matières organiques naturelles et les micropolluants tels que pesticides et résidus médicamenteux. Cette compréhension approfondie des processus nous permettra de mieux cerner les mécanismes de rétention et de transfert des polluants dans les zones humides.

Enfin, nous établirons des modèles de systèmes en incorporant les molécules organiques identifiées et les éléments ciblés (Cs et Co). Les interactions au sein de ces systèmes seront quantifiées en utilisant des techniques telles que l’ICP-MS, la HPLC (chromatographie liquide haute performance) et la ESI-MS. Cette démarche fournira une analyse précise et complète des processus en jeu. Les interactions seront ensuite validées avec les radionucléides ciblés pour assurer la fiabilité et la pertinence des résultats obtenus.

Résultats attendus

Les résultats attendus de ce projet de recherche sur une zone humide adjacente à la CNPE de Fessenheim sont d’une importance critique pour enrichir notre compréhension des processus environnementaux et écologiques. Les principaux résultats que nous anticipons sont les suivants.

  • Identification et quantification précise des polluants : Nous envisageons d’identifier et de quantifier de manière exhaustive les éléments traces métalliques et les polluants dans les échantillons de sol et d’eau interstitielle. Cela inclut les radionucléides tels que le Co-60 et le Cs-137, ainsi que les micropolluants organiques
  • Analyse avancée des interactions à l’échelle moléculaires : Nous ambitionnons d’acquérir une compréhension détaillée des interactions moléculaires entre les micropolluants organiques et les radionucléides. Cette analyse approfondie vise à élucider les mécanismes par lesquels ces interactions influencent la rétention et la mobilité des radionucléides et autres polluants. Ces connaissances approfondies seront essentielles pour informer les futures recherches et les pratiques de gestion environnementale.
  • Développement de stratégies d’assainissement et de gestion : Les résultats du projet contribueront à une évaluation plus précise des risques environnementaux liés aux rejets de radionucléides et d’autres polluants. Nous envisageons de développer des stratégies innovantes pour la gestion et l’assainissement des zones humides, afin de limiter la propagation des polluants et de protéger ces écosystèmes vitaux pour l’adaptation du changement climatique global. Ces stratégies seront cruciales pour guider les politiques et les pratiques de gestion durable des zones humides.

En résumé, ce projet vise à apporter des contributions significatives dans le domaine de la recherche environnementale, en fournissant des informations essentielles et en établissant des
bases solides pour la protection et la gestion durable des zones humides face aux défis posés par les micropolluants et les radionucléides.

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